Comment transmettre des messages difficiles?

Gesprek tussen twee personen

Communiquer est un exercice qui reste toujours assez difficile en soi mais c’est encore plus compliqué lorsqu’il s’agit de faire passer un « mauvais » message. A travers cet article, je souhaiterais donc vous aider à transmettre ce type de messages, en vous interpellant à travers un certain nombre de questions utiles et, surtout, en vous fournissant toute une série de trucs et d’astuces pratiques.


Qu’est-ce qu’un « mauvais message »?

Tout d’abord, il est assez intéressant et fort révélateur de se demander à partir de quel moment l’on considère qu’un message est « mauvais ». Ainsi, ne pas octroyer un jour de congé à l’un de vos employés qui vous en a fait la demande est-il un « mauvais » message ou pas? Il existe de nombreuses formes et divers degrés de mauvaises nouvelles: un simple « non » peut, en soi, être une mauvaise nouvelle, tout comme le fait d’annoncer à quelqu’un qu’il a été licencié. Sans compter que le fait qu’un message soit ou non perçu comme étant « mauvais » est subjectif et personnel.

Bien souvent, nous parlons de « mauvais » message lorsque nous nous attendons à ce qu’en réaction à la transmission de ce message, notre interlocuteur émette des sentiments négatifs et adopte par corollaire des réactions émotionnelles (parfois très vives). Nous pensons ici à des sentiments tels que la déception, la frustration, la colère, la tristesse, …

C’est pourquoi une conversation de ce type doit atteindre 3 objectifs différents:

  1. Tout d’abord, elle doit servir à transmettre le message. Cela peut sembler évident mais il existe de nombreux exemples d’employés qui, à l’issue d’un entretien de ce type, ignoraient s’ils avaient été promus ou s’ils étaient licenciés.
  2. Ensuite, elle doit permettre d’absorber les émotions. Il n’est certes pas possible de déterminer avec précision la forme concrète que ces émotions prendront mais une gestion efficace des émotions aura assurément un effet bénéfique sur le cours de la conversation.
  3. Enfin, elle doit viser l’acceptation par son destinataire des informations qui lui sont communiquées. Ce destinataire doit en effet comprendre que le message qu’il reçoit est définitif et non négociable.

C’est tout un art de pouvoir adéquatement transmettre des mauvaises nouvelles. En fait, pour pouvoir correctement communiquer des mauvaises nouvelles, il faut avant tout être en mesure d’utiliser les bons mots; mais il est encore plus important de pouvoir bien s’adapter à son interlocuteur(trice).


Pourquoi est-ce si difficile de transmettre un mauvais message?

Mener un entretien dans le cadre duquel il faut communiquer à son interlocuteur(trice) un mauvais message comporte un certain nombre de pièges. Ceux-ci paraissent assez évidents mais néanmoins, beaucoup d’entre nous tombent régulièrement dedans. Peut-être en reconnaitrez-vous certains?

  • Vous sous-estimez ou surestimez la gravité des nouvelles
  • Vous ne savez pas comment faire passer le message et vous en reportez l’annonce, vous tournez autour du pot et vous laissez trop longtemps l’autre personne dans l’ambiguïté
  • Vous enjolivez les mauvaises nouvelles
  • Vous ne parlez pas des mauvaises nouvelles en tant que telles
  • Vous parlez trop
  • Vous parlez trop de vous-même et de la difficulté que vous ressentez à transmettre le message
  • Vous réagissez intensément aux sentiments de l’autre personne, au lieu de simplement les laisser exister

Exemple: Message relatif à un licenciement

Non recommandé:

« Jean, nous avons déjà eu de nombreuses conversations et je voudrais te parler de tes performances. Je constate que tu essaies vraiment de faire de ton mieux et j’apprécie vraiment tes efforts. J’ai suivi de près ton travail et j’ai constaté que tu donnais le meilleur de toi-même. J’étais satisfait. Mais maintenant, j’en arrive malgré tout à la conclusion que cela n’a peut-être pas toujours été aussi bon ».

Recommandé:

« Jean, j’ai de mauvaises nouvelles à t’annoncer. J’ai décidé de mettre fin à notre collaboration ».


Pourquoi est-il malgré tout important de transmettre un tel message?

Clairement, ce qui aide beaucoup dans la transmission d’un mauvais message, c’est de toujours garder à l’esprit la (ou les) raison(s) pour laquelle(lesquelles) cette décision a été prise.

  • Pour l’employé(e) lui-même: par exemple, « créer dès que possible de la clarté pour la personne concernée »
  • Pour l’équipe: par exemple, « assurer un cadre transparent et cohérent autour de la permanence des bureaux »
  • Pour vous-même: par exemple, « confirmer mon rôle de manager qui s’assure du bon fonctionnement du bureau »

Comment aborder concrètement la transmission d’un message pareil?

Il faut distinguer 3 phases tout au long de cette conversation: préparer la conversation, communiquer la mauvaise nouvelle et, enfin, en assurer le suivi.  

1 – Préparer l’entretien  

Une simple liste de contrôle peut vous y aider. Réfléchissez tranquillement pendant une demi-heure à votre futur entretien et consignez ensuite par écrit le fruit de vos réflexions: cela procure apaisement et sécurité. Soyez notamment attentifs aux éléments suivants:

  • Avec qui allez-vous avoir cette conversation? Pensez aux caractéristiques personnelles de votre interlocuteur(trice) et demandez-vous si vous pouvez quelque peu anticiper sa réaction lorsque vous allez lui transmettre ces mauvaises nouvelles. Faites un inventaire des contacts récents que vous avez noués avec lui(elle) et essayez de déterminer à quel point le message sera inattendu pour lui(elle). Ne soyez pas trop optimiste à ce sujet. Les gens ont naturellement tendance à minimiser – voire à dénier – les mauvaises nouvelles! Tenez également compte des qualités ou des compétences avérées de cet(te) employé(e). Celles-ci pourront être utilisées pour soutenir l’employé(e) au cours de l’entretien ou pour étayer des possibilités de solution. Attention toutefois à ne pas utiliser les qualités / compétences de votre employé(e) pour lui dorer la pilule.
  • Quel est exactement votre message? Notez la première phrase de ce message. Soyez bref et précis et ne vous étendez pas trop. Au besoin, il sera toujours ultérieurement possible de quelque peu détailler votre message.
  • Quels sont les arguments? Notez les deux ou trois arguments les plus importants afin de pouvoir facilement les mettre en avant lors de la conversation.
  • Quelles seront vos propres émotions? Réfléchissez à la manière dont vous allez vous-même vous comporter durant cette conversation. Cela vous permettra d’éviter de devoir gérer d’éventuelles surprises désagréables liées à votre propre comportement. Assurez-vous de votre propre équilibre émotionnel.
  • Les solutions alternatives. Après la diffusion du mauvais message, l’avenir reste ouvert. Il est donc important de réfléchir à ce que vous pouvez éventuellement offrir à l’employé(e). Encore une fois, veillez à ce qu’il ne s’agisse pas d’un simple baume au cœur mais bien d’une aide ou d’un soutien concret. Par exemple, envisagez de fournir à cet(te) employé(e) une lettre de recommandation à l’issue de son licenciement ou de lui permettre de participer à une formation externe qui l’aidera à parfaire ses compétences.
  • Où et à quelle heure l’entretien aura-t-il lieu? Choisissez un espace calme et veillez à ce que personne ne puisse voir à l’intérieur; faites le nécessaire pour ne pas être dérangé(e) par le téléphone et éteignez votre propre téléphone portable. De préférence, ne choisissez pas le vendredi après-midi pour mener pareil entretien. En effet, pendant le week-end qui suit, les émotions peuvent être assez fortes et vous ne disposerez d’aucune possibilité pour répondre aux questions ou faire face aux éventuelles ambiguïtés. N’invitez pas non plus l’employé(e) trop longtemps à l’avance pour passer cet entretien.

En bref et c’est une règle d’or: 90% de la qualité de ces entretiens est déterminée par la qualité de votre préparation.

2 – La conversation elle-même (5 étapes)  

Étape 1: Transmettre les mauvaises nouvelles

Transmettez le message dès le début de la conversation et sans aucun détour inutile.

Les principaux pièges sont ici:

  • Report

Ne vous levez pas au début de la conversation pour prendre un café ou pour répondre à un appel. Ne commencez pas non plus par débiter quelques banalités ou futilités. Cela peut éventuellement vous faire sentir plus à l’aise mais cela ne facilite certainement pas la transmission du message.

  • Pilule dorée

Ne transmettez pas les mauvaises nouvelles d’une manière plus agréable qu’elles ne le sont en réalité. Optez plutôt pour une formulation telle que: « Bonjour Chantal, asseyez-vous. J’ai souhaité m’entretenir avec vous aujourd’hui car je dois vous annoncer que votre contrat de travail va être résilié ».

  • Hang yourself

N’essayez jamais de pousser votre interlocuteur(trice) à tirer lui(elle)-même des conclusions en lui posant des questions subtiles, telles que: « Chantal, combien de fois avons-nous déjà parlé de tes capacités de coordination au cours de ces derniers mois? » ou « Pensez-vous qu’il y a eu des améliorations récemment? ». Cela ne fonctionne jamais et vous vous retrouverez finalement vous-même complètement coincé(e) dans cette conversation.

Étape 2: Absorber les émotions

Les réactions aux mauvaises nouvelles peuvent aller de l’incrédulité au déni, de la tristesse à la colère, en passant par une forme de soulagement. Les mauvaises nouvelles sont – et restent – de mauvaises nouvelles. Ne commettez donc pas l’erreur de penser que de « moins mauvaises » nouvelles provoqueraient des émotions moins intenses. Une personne peut ainsi devenir furieuse rien que parce qu’elle n’a pas été autorisée à assister à une session de formation, tandis qu’une autre se montrera soulagée de savoir avec certitude que son licenciement est désormais définitif. D’où la grande importance que revêt la préparation de ces discussions.

A ce stade, le plus important, c’est d’écouter. Donnez à l’autre la possibilité de s’exprimer et d’évacuer sa tension. Tout ce que vous pourriez vous-même ajouter ne ferait qu’augmenter la pression. Il est donc nettement plus avisé de vous taire, d’écouter, de poser des questions et de résumer votre message.

Les principaux pièges sont ici les suivants:

  • Hit & run

Certaines personnes se ferment complètement lorsqu’elles reçoivent de mauvaises nouvelles. Vous devez néanmoins garder un œil sur le rythme de l’entretien. Au besoin, laissez le silence perdurer quelque peu. Règle pratique: n’interrompez les silences qu’en posant une question. 

  • Réconforter

Lorsque vous réconfortez votre interlocuteur(trice), vous combinez en même temps deux aspects qui sont incompatibles pour le destinataire du message: négatif (après tout, vous lui apportez de mauvaises nouvelles) et positif (vous le réconfortez). Le réconfort ne fonctionne pas à ce stade de la conversation. N’y recourez pas.

Il est difficile de déterminer combien de temps durera cette phase. En règle générale, vous pouvez continuer votre entretien si le destinataire du message vous pose la question: « Pourquoi? ». Si nécessaire, vérifiez qu’il est prêt à entendre vos arguments: « Voulez-vous que je vous explique pourquoi j’ai pris cette décision? ». Parfois, l’émotion revient. Continuez alors à faire progresser l’étape 2. En revanche, si le destinataire répond par l’affirmative à votre question relative à l’écoute de votre argumentation, passez alors à l’étape 3.

Étape 3: Exposer les arguments

Soyez bref et précis. Concentrez-vous sur deux à trois arguments au maximum. « Jouez la balle et pas l’homme ».

Les principaux pièges à ce stade sont:

  • Justifier

« Vous devez comprendre que … » Non, il n’y a rien à comprendre du tout et, en général, votre interlocuteur(trice) ne comprendra pas. Donc, ne comptez pas sur une quelconque compréhension de sa part.

  • Utiliser des mots différents lors de la deuxième ou de la troisième diffusion de votre message.

Soyez prêt à expliquer vos arguments une deuxième fois. Utilisez pour ce faire exactement les mêmes mots que ceux auxquels vous avez recouru la première fois. Cela renforce la clarté de votre message, augmente la prise de conscience de votre interlocuteur(trice) que la teneur de ce message n’est pas négociable et évite tout éventuel conflit de mots: « Mais vous venez de dire que … » (Voir ci-dessus: 1. Préparer l’entretien – Point 3).

Étape 4: Discuter des solutions

A ce stade, indiquez à votre interlocuteur(trice) les possibilités auxquelles vous avez préalablement réfléchi. Vous pouvez également les coucher sur papier.

Les principaux pièges sont ici:

  • Incertitude

« Oui, on t’a arrangé quelque chose, mais je ne sais plus très bien de quoi il s’agit exactement … »

  • Trop de détails

 Étape 5: Clore l’entretien

Durant la phase de clôture de l’entretien, portez une attention particulière aux deux points suivants:

  • Les collègues doivent-ils être informés? Et si oui, qui va le faire?
  • Que va faire le destinataire de votre message à l’issue de l’entretien?

Dégagez des accords clairs sur ce qui va suivre l’entretien. Expliquez ce que vous ferez et ce que vous attendez de l’autre. Fixez d’ores et déjà une prochaine réunion au cours de laquelle une discussion plus approfondie sur l’étape 4 (« Discuter des solutions ») pourra avoir lieu.

3 – Le suivi

En fonction du déroulement de la conversation par laquelle vous aurez transmis des mauvaises nouvelles à votre interlocuteur(trice), vous devez assurer un suivi:

  • Si une solution réaliste existe, exposez-la.
  • Si votre interlocuteur(trice) vous demande de dégager une solution, encouragez-le(la) et incitez-le(la) à trouver lui(elle)-même une solution (posez-lui des questions ouvertes). Il est préférable de convenir d’un rendez-vous distinct pour cela.
  • En cas de licenciement, convenez d’un moment ultérieur pour pouvoir prendre congé de votre employé(e) de manière respectueuse.

Les pièges du suivi sont les suivants:

  • Vous sentir responsable des conséquences des mauvaises nouvelles que vous avez communiquées à l’employé(e).
  • Avoir le sentiment que vous devez aider l’employé(e) à résoudre le problème causé par ces mauvaises nouvelles. Or, vous ne pouvez pas résoudre ce problème, tout au plus pouvez-vous aider l’employé(e) en l’encourageant à trouver lui(elle)-même des solutions ou à accepter ces mauvaises nouvelles.
  • Prendre des engagements que vous ne pouvez pas tenir.
  • Donner à l’autre personne l’idée que ces mauvaises nouvelles peuvent encore toujours être négociées.
  • Dire à l’autre personne que vous pensez que c’est une décision stupide mais que vous n’avez pas le choix.

Enfin, n’oubliez jamais que

« Communiquer à quelqu’un des mauvaises nouvelles d’une manière bien préparée et respectueuse facilite assurément les choses, mais cela reste toujours difficile »!

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Communiquer est un exercice qui reste toujours assez difficile en soi mais c’est encore plus compliqué lorsqu’il s’agit de faire passer un ‘mauvais’ message.